Une petite fille très curieuse
in Il était une fois… L’Art des Origines
En 1879, la petite Maria Sanz de Sautuola accompagne son père dans la campagne d’Altamira.
Ils partirent avec leur lampe-tempête et trouvèrent l’entrée de la caverne cachée sous un gros tas de pierres. Maria se glissa entre deux rochers et pénétra la première dans la mystérieuse grotte, sa lampe à la main. – Oh, des vaches ! Immobile, debout, la bouche et les yeux grand ouverts, la petite fille montrait le plafond de la caverne. Lorsque son père pénétra à son tour dans la grotte, il suivit du regard le doigt de la petite et découvrit le spectacle prodigieux qui s’offrait à leurs yeux… – Papa, regarde, il y a des taureaux là-haut ! Des taureaux, ou plutôt des bisons, massifs, puissants, par dizaines, côte à côte, peints avec de la terre rouge et du charbon noir, qui semblaient arrêtés dans leurs mouvements comme s’ils étaient encore vivants. Marcelino passa la main dans sa barbe. – Pas possible, murmura-t-il, ce n’est pas possible.
Un petit berger de Toscane
in Il était une fois… L’art au Moyen-Âge
En 1280, le jeune berger Giotto di Bondone mène son troupeau. Sa route va croiser celle du grand Cimabue.
D’une main ferme, l’adolescent traçait des signes sur une ardoise. C’était une de ces grandes lauzes, comme on en trouvait en Toscane sur les toits des bergeries. Avec un éclat de la pierre, il traçait des lignes blanches sur la surface noire et la pierre crissait sous son trait au milieu du silence. C’était midi dans les collines de Toscane et tout le monde dormait, hommes et bêtes. De grosses gouttes de sueur coulaient de sa tignasse en bataille mais le jeune berger n’en avait cure.
— Si j’étais toi, mon garçon, je ne resterais pas au soleil par cette chaleur. — Moi non plus, si j’étais vous, répondit le jeune garçon sans se détourner. — Ha, ha, ha ! Mais dis-moi, ils sont beaux, tes moutons. — Oui, l’herbe est bien grasse par ici. — Je parle de ceux que tu es en train de dessiner… L’homme qui se dressait devant lui était très grand et très maigre. Il avait croisé les bras et regardait, la tête penchée, les yeux rieurs, les morceaux d’ardoises posés à ses pieds…
Les passagers de l’ombre
in Il était une fois… Baroques et rococos
Rome, vers 1600. Michelangelo Merisi, dit Le Caravage, cherche l’inspiration…
« Porca Madona ! »
Le Caravage envoya son pinceau valser à travers l’atelier et avala un verre de vin. Rien n’allait plus dans ce tableau, et plus il le retravaillait, moins il en était satisfait. Il avait promis au cardinal de terminer le Martyre de saint Matthieu pour la fin du mois, mais le tableau n’était pas prêt. Il avait fait et refait plusieurs fois le visage de saint Matthieu sans parvenir à exprimer toute la souffrance qu’il ressentait. Et le vieil homme, brutalisé par les soldats avait toujours l’air de dire « non merci »… Pour accentuer la cruauté de la scène, il avait peint un enfant au premier plan, effrayé et choqué. Mais l’enfant, lui aussi, quoi qu’il fit, semblait trop théâtral et terriblement statique. Et pour l’instant, le seul qui fut à la torture, c’était lui, Le Caravage.
Le jour baissait, on ne voyait plus grand-chose dans l’atelier et bientôt, il ne pourrait plus rien faire ; Il se releva d’un bond souple, mit une dague à sa ceinture, et partit vers les quais de la basse ville…