Société d’édition des S. Guilhem – 2012
Après une courte halte à Namche Bazar, les deux hommes reprirent leur route. Comme l’avait envisagé Alexis, ils avaient décidé d’éviter la passe de Nangpa La et de suivre un autre itinéraire, qui rendait obligatoire le franchissement du col de LhoLa. Ce dernier, périlleux, avait l’avantage d’être discret : peu emprunté par les voyageurs à cause des dangers encourus, il n’était guère surveillé par les Chinois.
Après Namche, le chemin prenait rapidement de l’altitude, laissait la vallée de la Dudh Kosi pour celle de l’Imja Khola, passait par le monastère de Tengpoche – haut-lieu du bouddhisme tibétain – et les villages de Pengboche et Dingpoche, puis obliquait vers l’Everest et le glacier du Khumbu. L’Ama Dablam, que la route contournait tout au long du trajet, dévoilait alors toute sa majesté. Plus avant, apparaîtraient bientôt les derniers refuges : Lobuche tout d’abord, puis, un peu plus haut, GorakShep…
Au fur et à mesure de la montée, le paysage était devenu de plus en plus désertique et les arbustes de haute montagne avaient remplacé la luxuriante végétation des premiers jours. Bientôt, l’herbe rase allait également disparaître et l’environnement devenir minéral. Les sommets enneigés, innombrables, semblaient maintenant à portée de main. Le climat avait changé : le froid était devenu plus vif dans la journée et glacial la nuit. Quant à l’altitude, elle se faisait maintenant sentir : l’oxygène s’étant raréfié, chaque effort demandait toujours plus d’énergie. Ayant quitté Katmandu depuis pratiquement deux semaines, les deux hommes venaient d’atteindre le paradis des alpinistes et des trekkeurs : les plus hautes montagnes du monde se trouvaient là, face à eux…
Les journées étaient longues. S’étant adapté au rythme lent du lama, Alexis se contentait de marcher à ses côtés. Les deux hommes restaient la plupart du temps silencieux. Perdu dans ses songes, Alexis laissait son esprit vagabonder : il pensait souvent à son insolite découverte, quelques mois plus tôt, et à Karen, qu’il espérait vite retrouver. La jeune femme lui manquait, mais il ne regrettait pas ce périple : il savait qu’il devait retourner là-haut…
Parfois à la peine, le lama avait retrouvé courage en atteignant les premières pentes du glacier du Khumbu.
Chomolungma ! Chomolungma ! s’était-il exclamé en apercevant la pyramide noire de l’Everest, quatre mille mètres plus haut.