Gherasim Luca : ZÉros en Lucaphonie, de Luminitza C. Tigirlas

Gherasim Luca : ZÉros en Lucaphonie, essai littéraire, éditions du Cygne, septembre 2024
Illustrations : Doïna Vieru, artiste-peintre

 

LUCAPHONIE est le nom que je donne à un univers poétique qui fascine comme le chant du serpent et dont on ne sort pas le même, car avec Gherasim Luca on se laisse aspirés dans le tourbillon langagier qu’il dirige en maître, tourbillon qui forme-déforme tout une glèbe phonétique vocalement et graphiquement. C’est le terrain d’un jeu-ravinement de vie et de mort avec le langage que le poète mène seul à seul, dans des corps à corps sensuels jusqu’à l’animalité du cri et souvent dans la fureur de l’ironie. C’est le Trou de sa dette de nom, de père et de perte. À dix-sept ans Salman Locker de Bucarest s’autoproclama Gherasim Luca (1913-1994). Une lignée de suppléance s’invente au cours des années pour le poète, orphelin du (Z)Eros qui fait Un avec le Trou d’obus où fut déchiqueté son père. L’aboutissement auquel tend le poème proféré L’Autre Mister Smith, poème qui m’interpelle tout particulièrement, serait celui d’arracher le nom (de) Gherasim Luca au vrai-Gherasim Luca dans le combat entre les deux entités…

lien vers les éditions du Cygne

La Petite rivière qui avait soif, de Stéphane Amiot

La Petite rivière qui avait soif, album jeunesse, éditions Vivre tout simplement, octobre 2024
Illustrations : Fabrice Mondejar

 

 

La petite rivière dévale les flancs de la montagne, gorgée de force et de vie. Mais bientôt, elle va entrer sur le territoire des Hommes…
Son odyssée sera longue jusqu’à l’océan.
Y parviendra-t-elle toute seule ?

 

 

 

 

 

 

Je ne cours plus après mon ombre, de Jeanne Bastide

Je ne cours plus après mon ombre, roman, éditions Domens, août 2024

 

La petite fille ne court plus après son ombre. Elle s’y repose. Soupèse le poids de l’enfance. Recompose un univers.
Travail de débroussaillage pour arriver à recoudre toutes les ombres.

 

EXTRAIT

Il y a les jours où j’ouvre la main et je les sens. La paume vers le ciel, je soupèse leur présence. Ce n’est pas lourd – pas léger non plus. C’est là, à mes côtés. Une énergie qui prend appui dans la chair. Ce qui circule en moi et que je ne connais pas. Je sais que je les porte.
Sans pouvoir les nommer. Ne pas leur donner forme.
C’est là.
Une présence emmagasinée,  un élan… que je ne possède pas.

Parfois je les appelle. Toutes.
J’ouvre la main et je les sens. La paume vers le ciel, je soupèse leur présence. Les jours où le vide a pris trop de place. Je les appelle. Elles sont là.
Sans qualificatif. Sans verbe d’action.
Pure présence.

Celle qui a travaillé la terre   pour les propriétaires, qui a cousu pour les riches et qui n’a pleuré que pour elle
Celle qui est restée emmurée    dans sa chambre pendant vingt- trois ans quatre mois et douze jours
Celle qui a davantage aimé son mari mort que vivant
Celle qui pose pour la photo  – raide et empesée – son nouveau-né sans les bras
Celle qui a osé se peindre les ongles en rouge sang
Celle qui raconte    pour le plaisir d’ouvrir ses cicatrices et de raviver ses blessures
Celle qui rêve sa vie plutôt que de la vivre de peur de salir ses pensées
Celle qui n’a pas le temps d’éplucher ses sentiments, ni le loisir d’aller au vif de sa brûlure
Celle qui parle sans s’arrêter pour ne pas se poser  la question de ce qu’elle a à dire
Celle qui aimant trop les hommes a oublié qu’elle en a un
Celle qui, consciente de l’urgence de la tâche, les bras chargés d’enfant, de lessive et de pot-au-feu  – a dérobé    le droit  à la souffrance
Celle qui enveloppe sa peine dans du papier journal  comme des pelures de pommes de terre.

Je me souviens d’elle. J’étais encore enfant.
Suzanne. La voisine d’en face. Maman et mes tantes. Germaine et Adélaïde. Oui, c’était leurs noms.[…]

Un monde de toutes les couleurs, de Chloé Millet

Un monde de toutes les couleurs, album jeunesse, éditions Lire c’est partir, 1er septembre 2024
Illustrations : Thierry Manes

 

Nellie et son petit singe Nao embarquent à bord d’une montgolfière pour faire le tour du monde.
Dans chaque paysage, une couleur règne : les jeunes lecteurs doivent être attentifs aux détails pour découvrir les animaux qui se cachent dans le décor !

 

 

 

Éditions Lire c’est partir ici

  

Anomalies de l’humanité, de Jeremi Sauvage

Anomalies de l’humanité et autres histoires dérangeantes, nouvelles et poèmes, les Éditions du Désir, septembre 2024

 

Le fil rouge de ce recueil de 16 nouvelles est la question des « anomalies », des « aberrations », propres à notre monde, souvent en lien avec le milieu universitaire. Aux frontières du fantastique, de l’étrange et du bizarre, les textes sont tous en lien avec l’actualité d’une manière ou d’une autre. Les nouvelles sont présentées dans une progression alternant humour et dramaturgie, toujours aux carrefours des aspects étranges de nos vies et de nos sociétés, avec beaucoup d’intertextualité et de références à divers niveaux.

 

EXTRAIT (1ère page)

 

– Voilà pourquoi ceux qui ont survécu sont coupables. Ils sont des anomalies de l’humanité. Merci pour votre attention.

*

Mon nom est Ajna Singh et je dois écrire mon histoire car je ne sais pas de quoi mon avenir sera fait, ni même si j’aurai un avenir. Je ne sais pas non plus comment réagira la partie de ma famille qui vit à Bricklane, London Tower Hamlets, et j’ai bon espoir que mes cousins restés à Delhi n’entendront jamais parler de ce que j’ai découvert récemment. Je vais soutenir ma thèse de médecine demain. Mais mon superviseur, après une longue hésitation, m’a fait comprendre que le huis-clos sera obligatoire, eu égard aux conclusions de mon travail. Aucune communication sur le sujet, pas de public, un titre large (Étude épigénétique chez les enfants atteints de leucémie myéloïde chronique), un résumé volontairement évasif…

Mes parents m’avaient prénommée Ajna en pensant que la Nature me doterait de ce fameux troisième œil du Chakra. Je ne suis pas certaine de bénéficier d’un don ou d’un pouvoir qui fait de moi une personne exceptionnelle, mais j’ai l’impression d’avoir toujours voulu être Médecin, d’aussi loin que je puisse m’en souvenir. Soigner, aider, comprendre… les trois préceptes de mon enfance. Quand on grandit à Bricklane, au risque de choquer une certaine bien pensance, je vous jure que l’on part avec un sacré handicap sur le plan de la réussite scolaire. Mais je garde comme motivation toutes les insultes que […]

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Françoise Renaud en lecture-concert et en conférence autour de Colette Richarme | bibliothèque multimédia du Grand Guéret | 30 & 31 août 2024

En clôture de l’exposition Colette Richarme, « Jardins transfigurés » (28 juin – 31 août 2024), deux beaux événements vont se tenir à la bibliothèque multimédia du Grand Guéret en cette fin d’été.

 

en savoir plus sur la lecture concert AU-DELÀ DU BLANC
avec le musicien Frédéric Tari

 

« Écrire Richarme, une expérience sensible » | samedi 31 août 2024, à 16 h | durée 1 h
Françoise Renaud évoquera sa rencontre avec l’artiste à travers les témoignages de ses deux filles et la découverte de son œuvre. Comme un dialogue, un partage sensible entre deux femmes à distance dans le temps. Elle écrit : « Richarme a croisé ma route. Par hasard. J’ai eu envie de comprendre pourquoi elle avait consacré sa vie à l’art de peindre. Pas à pas, j’ai senti vibrer sa voix, sa passion, ses chagrins. »
Richarme (1904-1991) – Au-delà du blanc (CLC éditions, 2010)

 

Du Fol Amour à la Grâce, de Régine Nobécourt-Seidel

Du Fol Amour à la Grâce, poésie, éditions Constellations, juillet 2024
Encres et aquarelles sur papier de JAPA (Jacqueline Lou Pâris)

 

Amour, Fantaisie Humour vibrent à l’unisson dans les premiers poèmes du recueil. C’est « Aimer la vie », la chanter, la provoquer, dans une continuité du recueil précédent Eros en rit encore !

« Et puis la Grâce » invite à une redécouverte de soi, de l’autre. Les problématiques actuelles y sont palpables. Mémoire mêle Passé, Imaginaire, Conscience, Inconscience comme pour secouer en chacun de nous ces poussières d’étoiles qui font Vie et Lumière.

 

 

EXTRAITS

De la source à la mer

L’eau que j’ai bue dans tes paumes était toujours fraîche
L’eau que j’ai bue à ta bouche était source de mes rêves roses et bleus
L’eau que je lape sur ta peau, sale le vert de mes nuits
L’eau qui s’évapore de nos corps nous emporte toujours trop loin
Mais c’est l’eau de mes larmes qui dessèche mes joues
Qui assèche mon cœur et a noyé mon bonheur
Éteint le feu de mes yeux
Quand dans l’eau putride de marais fangeux
Des amours sans lendemains
Tu as définitivement perdu ton âme.
Il paraît que c’est l’eau bénie par le prêtre qui lave
Tous les péchés de la Terre. Croire encore en elle !
Qu’importe tout cela aujourd’hui
Puisque je n’oublierai jamais l’eau du fleuve de mon enfance
Eau douce-amère tant lourde du passé.
Eau si lourde de mes ancêtres
Eau, dernier berceau de tant de jeunes hommes
Ô tous ces hommes venus du monde entier, tous ces sangs mêlés
Ô fleuve tranquille qui a bercé mes peines, recueilli mes chagrins au chanvre de
tes berges
Ô fleuve qui a guidé mes premiers pas et donné sens à ma vie
Ô fleuve tu couleras jusqu’à mon ultime nuit en mes veines au sang trop rouge
Jamais je ne t’oublierai, crois-moi, parce que toi tu es Amour, le vrai !

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Danse avec les vivants, d’Amélie Louis

Danse avec les vivants, roman, éditions Hello, juillet 2024

Et si nos choix de vie étaient dictés par les désirs familiaux ? Et si le libre arbitre n’était qu’une illusion ?
Annie vient au monde après la mort de jumeaux. Comment les remplacer ? Elle s’évade du poids d’avoir à consoler ses parents grâce à l’imaginaire.
Dans la ferme familiale, le songe côtoie la violence larvée qui sclérose le couple parental. Bientôt la mort rode dans son cœur d’adolescente. Il faut une tornade pour choisir la vie, ce sera la maternité. Mais ses amours tournent court, sa vie effrénée est une fuite, sa passion d’enfance pour l’écriture reste dans l’ombre. Quand elle prend conscience que des non-dits familiaux lui imposaient ses choix, elle fait le premier pas vers sa liberté d’être…

Ce roman entraînera le lecteur à revisiter son histoire et à redécouvrir ses racines familiales.

 

EXTRAIT

Cet été-là, un endroit te fascine, le pré de la Mouille. Il tient son nom d’être coupé en deux par un bosquet humide. Récemment, tu as entendu dire par ton père que les broussailles recèlent une cavité dont plusieurs longues perches mises bout à bout n’ont pu toucher le fond. Il est interdit de descendre seule aussi loin sur le chemin, mais dès que la surveillance se relâche, tu y cours en frôlant de la main une frénésie de marguerites et de coquelicots. Haletante, tu t’appuies à la barrière.

Les grandes personnes n’en savent rien, mais assurément, sous le fouillis de ronciers dont tu étudies l’imbroglio en caressant des hallucinations, il existe un passage secret qui mène au pays des merveilles. Là-dessous, il y a des corridors ourlés de fleurs qui parlent et des champignons magiques, peuplés de chenilles qui fument et, tout au bout, un grand jardin où Alice t’attend. Oui, elle t’attend, car tout ce que tu cherches te cherche aussi, tu le sais.

Mais de blanc, pas de lapin, juste le poil luisant d’un énorme taureau tout en muscles qu’on a isolé là du reste du troupeau. Il semble toujours furieux, s’arrête de ruminer lorsque tu approches de la barrière et, si tu restes trop longtemps à le regarder, il se met à gratter le sol. Nombre de fois, tu t’es promis, lorsque l’atrabilaire serait occupé ou endormi, de rejoindre Alice avec qui tu as partagé mille aventures avant de t’endormir. Sous le soleil vertical de ce début d’après-midi d’été, le colosse est de l’autre côté du pré, cou tendu vers le mystère sauvage de la forêt qui délimite la propriété. C’est maintenant ! Il faut escalader la barrière faite de rondins lisses sur lesquels on a cloué des planches en diagonale. Ni adhérence ni point d’appui horizontal pour tes sandales. Tu t’agrippes aux planches qui meurtrissent tes paumes. Une sourde incertitude t’envahit à chaque glissade, tu te cramponnes. Tu poses enfin une main sur le rondin supérieur, l’autre la rejoint. Le ventre en appui, les bras serrés autour du cylindre lustré par le temps, tu parviens enfin à te hisser à califourchon au sommet. Alors que tu te concentres pour sauter de l’autre côté sans te tordre les chevilles, tu vois le colosse foncer dans ta direction.

Nicole Barromé en Scène libre à Voix vives, festival de poésie de Sète | 26 juillet 2024

Nicole Barromé sera présente avec les relèvements poétiques
sur la SCÈNE LIBRE à 16H00 le 26 Juillet

COUR DU SEAMEN’S CLUB,
24 QUAI DU MAROC, à côté de la Capitainerie.

Elle lira des extraits de L’expérience de l’encre, La joy et le reste..