Depuis le 1er décembre 2016, les éditeurs sont tenus de procéder à la publication numérique des œuvres sous contrat. À défaut, et comme stipulé dans les articles 9 et 10 de l’ordonnance du 12 novembre 2014, les auteurs pourront récupérer leurs droits pour cette forme d’édition (et elle seule) en adressant aux éditeurs concernés une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception. Dès lors, l’éditeur disposera d’un délai de trois mois pour procéder à cette publication.
Voici un article d’ActuaLitté pour en savoir plus : Droits numériques : l’échéance du 1er décembre, cruciale pour auteurs et éditeurs
La plupart des contrats signés depuis la fin 2014 sont supposés se conformer au texte de l’ordonnance du 12 novembre 2014.
En cas de cession des droits d’exploitation numériques, ces contrats doivent comporter une partie séparée qui définit les modalités de publication et mentionne le pourcentage de rémunération de l’auteur.
Il n’en va pas forcément ainsi pour les contrats signés avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance, mais la loi oblige les éditeurs à les mettre en conformité avec le Code de la Propriété Intellectuelle, lequel stipule :
Art. L. 132-17-1. — Lorsque le contrat d’édition a pour objet l’édition d’un livre à la fois sous une forme imprimée et sous une forme numérique, les conditions relatives à la cession des droits d’exploitation sous une forme numérique sont déterminées dans une partie distincte du contrat, à peine de nullité de la cession de ces droits.
Ce rendez-vous du 1er décembre 2016 donne aux auteurs une occasion à saisir pour obtenir :
- Une mise à jour des contrats non conformes à l’article ci-dessus. À commencer, bien entendu, par ceux qui ne font mention de la cession des droits numériques que sous une forme évasive, du type « reproduction sur tous supports et par tous procédés actuels ou futurs ». Le contrat doit alors faire l’objet d’un avenant mentionnant les conditions de la publication au format numérique. Faute de quoi, l’auteur pourra obtenir la résiliation du contrat pour cette forme spécifique d’exploitation de l’œuvre concernée.
- Une négociation des pourcentages de droits dignes de ce nom pour leurs publications en ebook. Le coût de fabrication d’un livre numérique étant presque négligeable, et son prix de vente étant le plus souvent très inférieur à celui du livre imprimé, les auteurs devront veiller à obtenir des pourcentages nettement supérieurs à ceux du livre imprimé. On leur conseille d’obtenir que leur rémunération soit au moins égale à celle obtenue sur la vente d’un livre imprimé. Si, par exemple, l’auteur touchait 10 % sur un livre vendu au prix public hors taxe de 15 €, soit 1,50 €, il aurait bien tort de céder ses droits numériques pour une rémunération inférieure.
Dans le cas où le contrat est non conforme au texte de loi et doit faire l’objet d’un avenant sur la publication au format numérique, le SELF conseille aux auteurs de profiter de cette occasion pour obtenir de meilleures conditions financières.
Nombre d’éditeurs déjà spécialisés dans ce type de publication accordent aux auteurs des pourcentages qui vont de 30 % à 35 % (pour une vente via une plateforme qui elle-même prélève de 30 % à 40 % sur le prix public du livre) à 50 % au cas où la vente est effectuée directement par l’éditeur. Ce qui aboutit à une répartition des droits à parts égales entre auteur et éditeur. L’auteur devra par ailleurs veiller au fait que les ventes dites promotionnelles, à prix réduit sinon nul (publicité), sous forme de « bouquets » ou pour des lectures fragmentaires, ne lui valent pas de n’obtenir qu’une rémunération dérisoire : c’est à l’éditeur et non à l’auteur d’assumer les risques que génèrent l’exploitation commerciale des œuvres dont les droits lui ont été cédés.
On conseillera aussi fortement aux auteurs de ne pas traiter avec les éditeurs (et ce sont souvent les plus « gros ») qui freinent des quatre fers pour « passer au numérique ». Les pratiques de ceux-là sont connues et, dans la plupart des cas, néfastes aux auteurs : pourcentages équivalents (voire inférieurs) ou à peine supérieurs à ceux des droits papier, et livres numériques vendus à des coûts prohibitifs — ce, pour préserver le marché du livre au format poche. Les auteurs n’ont aucune raison de céder leurs droits numériques à ce genre de partenaires : on leur conseillera donc tout simplement de ne pas le faire et de s’adresser à des éditeurs qui leur accorderont de meilleures garanties de commercialisation et de meilleures rémunérations.
Mentionnons pour finir que :
« Art. L. 132-17-7. – Le contrat d’édition comporte une clause de réexamen des conditions économiques de la cession des droits d’exploitation du livre sous une forme numérique. »
Si donc vous avez cédé vos droits d’exploitation numérique à un éditeur dont les performances commerciales ne vous satisfont pas, vous pouvez faire valoir cet article du Code de la Propriété Intellectuelle au bout de quatre années d’exploitation.
Illustration : ActuaLitté, CC BY SA 2.0