Tout à la fois sidérés, anéantis et révoltés par l’attentat commis à la rédaction de Charlie Hebdo, nous ne resterons pas muets.
D’abord parce que les mots, c’est notre métier, notre art — et le dessin aussi, pour certains d’entre nous. Ensuite parce que la liberté, c’est notre credo – dans une association qui regroupe tant de personnalités et de tempéraments différents.
Nous invitons tous ceux qui le souhaitent à se mobiliser en s’exprimant sur ce blog, avant que nous réfléchissions à d’autres manifestations possibles. Partageons dès maintenant notre indignation.
Pour la liberté de dire — malgré tout, de Jeanne Bastide
C’est écrit.
Sur le visage – sur tout le corps.
On se surprend à vouloir suivre du doigt rides et cicatrices
Clignement d’yeux
Et même le geste du bras.
Tout son corps clame, crie.
Il le dira malgré tout – même la bouche cousue.
Rester debout et hurler de toute sa peau
S’il se tait, il sombrera. Il le sait.
C’est à ce prix.
Moi, l’analphabète du visage, j’ai su lire
Les plis de ton épiderme
Les tâches et les éraflures.
Maintenant ça fourmille au bout de mes doigts
Et ma langue est meurtrie.
Parce que les émotions immédiates, aussi importantes soient-elles, ne remplaceront jamais notre vigilance, nous continuerons d’écrire.
Je suis un inconditionnel de « HARA KIRI », dont j’avais les tous premiers numéros dans le début des années 60, numéros dont certains seraient d’ailleurs impubliables de nos jours, car politiquement trop incorrects, tant ils mélangeaient, avec la merveilleuse folie créative de l’iconoclastie destructrice des professeur Choron et autres Cavanna, Wolinski et Reiser, tous les poncifs, scatologie, sexisme et racisme, qu’ils mixaient allègrement avec un humour de 2ème ou 3ème degré, bien entendu inaccessible au quidam lambda. Lecteur aussi de CHARLIE HEBDO, j’appréciais leur liberté de penser et de dessiner, même si parfois je trouvais que la tendance extrême-gauchiste de leur ligne éditoriale tendait pour moi à l’éloigner des fondamentaux de l’humour « trash » de »HARA KIRI ».
Cependant et paradoxalement (et tragiquement !), ce sont les islamistes intégristes qui ont fourni (par l’intermédiaire des scandinaves, premiers à prendre en marche le train des caricatures de Mahomet) un sujet… brûlant et éloigné des schémas politiques classiques et démodés du genre « lutte des classes » qu’ils privilégiaient alors ; ils ont eu comme une sorte de révélation (M’enfin !) et se sont retrouvés investis, presque « à l’insu de leur plein gré » d’une sorte de mission qui exigeait pourtant un extrême courage au cours de laquelle ils ont compris – et pris à bras-le-corps – un phénomène que nos politiques et nos médias hésitaient par pleutrerie électoraliste ou démagogique à pointer du doigt de peur de « stigmatiser une partie de la population » ! Et d' »aplatventrisme » en « aplatventrisme », voilà où nous en sommes arrivés, alors que cette fameuse partie de la population, les citoyens Français d’origine arabe et – ou – musulmane, se seraient d’autant moins sentis « stigmatisés » (et j’en sais quelque chose personnellement) qu’en grande majorité, ce sont des citoyens exemplaires qui, non seulement n’ont rien à voir avec ces voyous et ces tueurs dégénérés qui haïssent la France, mais souffrent de leurs exactions, craignant d’être injustement montrés du doigt. Alors, les pleurs, le soutien moral, les hommages aux victimes de cette effroyable tuerie, bien sûr, il faut en passer par là, c’est émouvant, c’est cathartique, c’est la phase d’un deuil difficile et douloureux, mais c’est insuffisant. Quand un chirurgien enlève une cellule cancéreuse, c’est pour l’éliminer et non pour la mettre sous cloche et la nourrir ou la renvoyer sur un charter. Alors, l’émotion passée, je crains fort que nous ne retombions malheureusement dans la douce léthargie et l’inconscience veule qui caractérisent nos édiles, alors que, comme beaucoup osent enfin le dire « Nous sommes en guerre » et, parce que nous n’avons pas le choix, nous nous devons de gagner cette guerre : pour la Liberté, l’Égalité, la Fraternité, la Laïcité et afin que nos enfants et nos petits-enfants continuent à vivre dans un pays démocratique et républicain dans lequel la liberté de penser, de dire et d’écrire ne serait pas un vain mot et dans lequel le mot « blasphème » serait enfin supprimé des dictionnaires et remplacé par « amour » !
Ils ont tué Gavroche !
Certes le choc est immense. La rédaction de Charlie abattue froidement, c’est la liberté d’expression qu’on a voulu toucher au cœur. C’est donc nous tous, citoyens d’un pays qui a porté ce beau flambeau de liberté de par le monde. Derrière la cible, le pays de Voltaire et Hugo est visé. C’est l’ironie, l’esprit critique, la gouaille, le rire, la satire, le courage d’affronter la nuit obscurantiste, c’est le génie français qu’on a voulu abattre. C’est cette « petite grande âme » qu’était Gavroche, tirant la langue aux assassins, aux brutes, aux ignorants, aux imbéciles, aux bourreaux de tous poils que les assassins ont tué. Gavroche, c’était Cabu, Charb, Wolinski, Tignous, Honoré et tant d’autres qui, d’un trait de crayon, croquait le ridicule des politiques et religieux et les délires des terroristes. Avec Hugo, Gavroche avait le temps de narguer ses tueurs et d’échapper aux premières balles. L’équipe de Charlie n’en a pas eu le temps. Comme ce gamin de Paris, ils sont tombés parce qu’ils étaient au front. Un peu seuls peut-être… Depuis longtemps, Charlie était dans le collimateur des Islamistes. On savait que l’hebdo avait subi un premier attentat. A-t-on baissé la garde ?… Aujourd’hui, après l’effroi d’hier, on les pleure tous, y compris les victimes anonymes qui se sont ajoutés à cette funèbre liste. On sait déjà qu’il nous faudra aider Charlie à renaître de ses cendres, prendre un abonnement pour une année. Charlie doit vivre, survivre ! Gavroche ne peut mourir ! Son bel esprit aura toujours raison de l’ignorance !
Yves Carchon
contribution de Thierry Crouzet
http://blog.tcrouzet.com/2015/01/08/paris-france-2145/
C’est un crime odieux, d’une abominable lâcheté qui a été commis hier contre des journalistes. Des hommes sont morts dans une extrême barbarie pour avoir voulu simplement s’exprimer. Ils avaient pourtant choisi de le faire d’une façon pacifique par le dessin et la dérision. Les meurtriers sont des fous furieux. Opposer une arme à un simple stylo relève de la pathologie! Par leur geste, ces extrémistes ont également porté atteinte à la liberté d’expression et par conséquent à la démocratie. Toutefois ils n’ont pas réussi à ébranler la république. La nation a opposé l’amour à la haine. Il y a eu une admirable cohésion nationale « spontanée ». Une union sacrée entre tous ceux qui se sentent avant tout des citoyens du Monde.
Soyons néanmoins vigilants pour faire en sorte que, dans les jours qui suivront, les tensions communautaires ne s’exacerbent pas; le fanatisme n’est pas inhérent à la religion musulmane. Il ne faudrait surtout pas qu’il y ait un amalgame. Le fanatisme n’a rien à voir avec la religion qui incite au contraire les hommes à travailler sur eux mêmes dans le but de s’améliorer, d’éprouver de la compassion et de faire preuve de tolérance. Le fanatisme n’est pas la religion.
Florence Ferrari
Quelle drôle d’idée, à la foire aux idées…
Douze ce mercredi, une ce jeudi, sept ce vendredi. Combien, depuis si longtemps et pour longtemps encore…
Mourir assassiné. Tué pour une idée. Quelle idée !
Quand ma tête éclatera, quand mon cœur cessera de battre, quand mon sang s’écoulera, puisse mon esprit libre, encore libre, toujours libre, partir à la recherche d’un crayon. Et dessiner une étoile.
Je ne suis pas le Charlie de ces Charlots qui ne savent que surenchérir jusqu’en haut de la Tour Eiffel. Je suis une fidèle lectrice de Charlie Hebdo journal courageux et libre, qui fut d’abord Hara-Kiri, journal bête et méchant qui survit à la bêtise et à la méchanceté
de la part de Denise Miège Simansky :
« Bonjour. Je pense que tous ceux qui crient « je suis Charlie » au lieu de concourir à la plus belle pancarte, s’ils veulent faire oeuvre utile, devraient s’abonner ou se réabonner à Charlie pour permettre au journal de survivre, parc e que c’est lui qui est Charlie… »